La conquête des Amériques

Gregory Wallerick est docteur en histoire moderne à l’Université de Nantes. Ses recherches portent sur l’iconographie des rencontres entre les peuples d’Amérique et d’Europe, en particulier au XVIe siècle.

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L’année 1492 semble être une date importante de l’histoire mondiale : Celle de la rencontre entre l’Europe et le continent américain, sous la bannière de Christophe Colomb. C’est aussi une première mondialisation, c’est-à-dire la possibilité de considérer la Terre entière dans le monde. Deux conséquences sont directement appréciées de ce contact. La première résonance concerne la découverte, pour les Européens, de différents peuples qui semblent vierges de la civilisation et de la religion. Ces populations constituent autant de brebis perdues qui doivent être converties à la foi catholique, alors que la menace musulmane est pressante et que la dissidence au sein du christianisme augmente avec le schisme protestant. La deuxième conséquence est l’extension de l’Ancien Monde. Les royaumes d’Espagne et du Portugal sont les le premier à qui le pape a permis de s’installer dans les espaces américains. D’autres grandes puissances européennes, comme le Royaume de France et d’Angleterre et, plus tard, la République des Provinces unies, ont tenté, au XVIe siècle, de s’installer dans le Nouveau Monde, de façon éphémère ou permanente.

La conquête des Amériques par la puissante monarchie catholique espagnole a réuni plusieurs territoires en son sein dans le cadre d’une même politique, dirigée par Philippe II d’Espagne et renforcée par l’union des Couronnes à partir de 1580 (expression historiographique sous laquelle l’union dynastique des Espagnols et les monarchies portugaises de 1580 à 1640, une ambition récurrente chez les monarques ibériques médiévaux). Comme l’a expliqué Serge Gruzinski, Serge Gruzinski, Les quatre parties du monde. History of Globalization — Editions de La Martinière, Paris, 2004, 479 p., la monarchie espagnole fonde la première économie mondiale, basée sur un déploiement unique, au niveau planétaire, sur sa bureaucratie ses banquiers, ses hommes d’affaires, son armée sans oublier l’emprise de l’Église et la tentaculaire Compagnie de Jésus Compagnie de Jésus : Il ordonne des religieux catholiques masculins dont les membres sont des clercs réguliers appelés jésuites. La vocation des jésuites est de se mettre au service de l’Église catholique. Cela les a rapidement amenés à s’engager dans une réforme catholique post-tridentine et à se concentrer sur l’évangélisation, la justice sociale et l’éducation, une véritable pieuvre qui relie, par ses multiples ramifications, les quatre parties du monde au sommet de Madrid. Les Amériques ont fasciné — et continuent de fasciner — les Européens depuis leurs premiers contacts avec ce continent. Ces terres énormes semblent déborder de trésors fabuleux, de ressources inépuisables, et le pays d’Europe qui a réussi à les saisir puis à les extraire verrait sa puissance augmenter de façon exponentielle devant ses rivaux. Des terres fantasmées, à la fois de leurs paysages et de l’inconnu qu’elles suscitent, les Amériques ont constitué, pour les Européens du XVIe siècle, une nouveauté pour une Europe exiguë dans sa pelouse carrée, ainsi qu’un débouché. Au-delà de cette vision céleste, la réalité agit également comme une rencontre qui peut être perçue sous de multiples angles.

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La rencontre avec les Américains

Ces peuples, isolés du reste du monde, souffrent de tout le poids de la rencontre avec des Européens qui cherchent rapidement à s’approprier leurs terres mais aussi leur âme. L’arrivée de ces nouveaux conquérants s’accompagne de maladies dont les remèdes indigènes sont inefficaces. Et dans la politique de la table rase, les conquérants détruisent de nombreuses sources qui auraient pu les aider à saisir la complexité de ce nouveau monde, la diversité de la richesse des croyances et la façon de vivre des Amérindiens. Au fur et à mesure que la conquête progresse, la perception change. Les tribus indigènes semblent, à première vue, pacifiques, mais dans l’esprit européen, ils deviennent des opposants violents à des pratiques horribles qui doivent être réduites en esclavage ou dominées. Ces rencontres sont accompagnées de rêves et de désirs multiples, une terre vierge baignée par les taches de l’ancien monde. La toponymie des territoires conquis est éloquente : Nouvelle-Espagne, Nouvelle-Castille, Nouvelle-France, Nouvelle-Angleterre. Chaque pays qui y met en œuvre tente de recréer un nouvel espace sans oublier son identité.

Échanges et rejet de l’altérité

Une autre vision apparaît en ce qui concerne les échanges qui ne sont pas nécessairement économiques. Les peuples autochtones vivaient à leur propre rythme sans connaître les nombreux échanges et contacts établis entre les Européens et le continent africain ou asiatique au cours des siècles précédents. Ces nouveaux éléments sont ensuite importés dans le nouveau monde, comme la religion chrétienne avec ses divisions et ses critiques, ou, de façon plus prosaïque, les vêtements, le fer, les armes par le feu, l’esclavage et le travail forcé. Si les gens et les idées circulent entre l’ancien continent et les Amériques, les maladies en profitent et évoluent dans les deux sens. Cela facilite grandement la Conquête, car les dieux indigènes semblent avoir abandonné leur troupeau. Ces premiers contacts signifient également le rejet de l’Autre et, par conséquent, une opposition systématique à la culture américaine, à ses croyances ou aux traditions de ces peuples qui, bon gré gré, intègrent l’univers européen. La conquête est confrontée à une triple possibilité d’accepter, de tolérer ou de rejeter cet autre Américain. Tous les points de référence, croyances et coutumes sont ensuite remis en question ou même progressivement abandonnés.

Le XVIe siècle reste cependant celui de la conquête des Amériques dominée par les Espagnols de Charles Quint puis de Philippe II. Mais les méthodes utilisées sont critiquées, comme le travail forcé par le Système Encomieda encomieda : octroi de terres et aux peuples autochtones qui y vivent et qui ne travaillent que pour le détenteur de la concession, qui doit en retour demander aux Indiens d’en faire de bons chrétiens), l’esclavage et la couronne ibérique sont également de compétence. d’autres pays européens. Le XVIIe siècle semble être dominé par les courses maritimes, qui ont commencé dans le dernier quart du siècle précédent pour un établissement durable dans les Amériques. Ce siècle s’accompagne également de questions humanistes et théologiques — Les Américains ont-ils des âmes ? Pouvons-nous pratiquer le syncrétisme religieux pour que les masses amérindiennes rejoignent le culte catholique ? Pour établir leur domination, les différentes couronnes européennes exploitent systématiquement leurs réalisations à travers des expéditions soigneusement gardées : la naissance de l’Acadie française, la colonisation de la région de Roanoke par l’Anglais John Smith ou la fondation de la Dutch India Company. Ces créations coïncident avec le déclin de la monarchie ibérique. L’âge d’or de l’Espagne touche à sa fin depuis l’échec de la flotte hispano-portugaise contre les Britanniques (1588). Les puissances européennes et en particulier la France y ont finalement mis fin sur leurs terres lors de la victoire de Rocoi (1643) sur la terrible infanterie espagnole, plus connue sous le nom de tercios.

L’immensité du territoire des Amériques

Cependant, un siècle, voire plus, ne suffit pas pour capturer tout cet espace. Pendant plusieurs décennies, d’autres noms sont restés associés aux voyages d’exploration tels que le navigateur La Pérouse (1741 – 1788) en 1780 ou le géographe von Humboldt (1769 – 1859) au début du XIXe siècle. Nous nous souvenons également de l’expédition de Lewis (1774 — 1809) et Clarke (1770 — 1838) commandée par la toute jeune république américaine entre 1804 et 1806. Les motivations de ces voyages n’ont pas varié : décrire la topographie, apporter des descriptions des peuples, des animaux et des plantes rencontrés.

Un livre dense, divisé en une douzaine de chapitres équilibrés et structurés qui expliquent clairement le « changement » de l’Ancien Monde. À la fin du livre, nous trouvons un lexique précieux pour éclairer la lecture avec acuité.

Bertrand Lamon pour clonautes

Voyage

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